Les Cahiers des ÉCO

Maroc-Afrique du Sud : Normalisation à plusieurs inconnues

«Pretoria pourrait retirer sa reconnaissance à la RASD»

François Conradie, Analyste au cabinet sud-africain NKC African Economics

En Afrique du Sud, la rencontre officielle historique entre le roi Mohammed VI et le président sud-africain Jacob Zuma a été interprétée comme un changement de position de Pretoria sur la question du Sahara. C’est ce que rapporte François Conradie, analyste au cabinet sud-africain NKC African Economics. Selon lui, cet «adoucissement» de la position de l’un des principaux soutiens du Polisario présage d’un retrait de la reconnaissance à la «RASD». Interview.

Les Inspirations ÉCO : La rencontre entre le roi Mohammed VI et le président Jacob Zuma à Abidjan en a surpris plus d’un. Comment l’interprétez-vous depuis l’Afrique du Sud ?
François Conradie : Ce n’est pas tant la rencontre qui a surpris, que l’engagement de rétablir les relations diplomatiques entre les deux pays. En Afrique du Sud, cela a surtout été interprété comme un changement de position sur le dossier du Sahara, un adoucissement de la position de Pretoria. Il y a eu jusque-là peu de discussions sur les opportunités que représentera une meilleure relation avec le Maroc.

Sur la question du Sahara, une entente est-elle possible entre Rabat et Pretoria ?
Je pense que oui. Il est clair que la «RASD» est en train de perdre ses soutiens, et cette rencontre à Abidjan fait penser que Pretoria pourrait retirer sa reconnaissance, chose qui paraissait invraisemblable il n’y a pas longtemps. Souvenons-nous que l’Afrique du Sud n’a reconnu la RASD qu’en 2004, en réaction à la position de Rabat sur la question du référendum. Je crois que Pretoria pourra accepter l’impossibilité de l’indépendance du Sahara, mais continuera à insister sur ce qu’ils appellent ici son droit à l’autodétermination. En tout cas tant que  l’ANC (Congrès national africain) est au pouvoir en Afrique du Sud.

Selon-vous, quels sujets de convergence peuvent exister entre l’Afrique du Sud et le Maroc ?
Il y en a beaucoup, à commencer par les affaires. Les grandes sociétés marocaines sont très présentes en Afrique francophone tandis que les groupes sud-africains ont fait des percées dans les pays anglophones. Nous pourrons bientôt voir des champions véritablement panafricains émerger de partenariats entre des sociétés marocaines et sud-africaines, probablement dans les services financiers dans un premier temps.

Jacob Zuma étant bientôt sur le départ, «la bonne entente» qui a prévalu lors de l’audience d’Abidjan a-t-elle des chances de porter ses fruits ?
Le mandat de Zuma ne prend fin qu’en mai 2019, normalement donc il reste quand même deux ans afin de voir se concrétiser quelque chose. Il est vrai qu’il sera remplacé comme président de l’ANC d’ici trois semaines, mais je ne crois pas que son remplaçant prendrait des positions publiques qui pourraient affecter les relations étrangères du pays.

Comment l’élite politique et économique sud-africaine perçoit-elle la percée du Maroc en Afrique ?
Elle n’a pas été très largement remarquée, à part parmi les spécialistes du continent. Nous souffrons d’une certaine myopie quant à l’Afrique et avons tendance à ne considérer que sa partie anglophone. Pour l’élite politique, cela changera avec la présence du Maroc au sein de l’UA et je pense que nous devrons anticiper une concurrence entre les diplomates des pays pour exercer de l’influence. Pour les élites économiques, je pense qu’on pourrait voir bien plus de coopération, vu les complémentarités qui existent entre les opérations des groupes marocains et sud-africains

Pensez-vous qu’avec les récents changements de présidents à la tête de plusieurs pays d’Afrique Australe, le temps soit favorable au Maroc pour y nouer des relations de confiance ?
Oui, une opportunité se dessine pour un rapprochement avec l’Angola et le Zimbabwe mais comme pour l’Afrique du Sud, il va falloir du progrès sur le dossier du Sahara. Les États de la sous-région insistent aussi sur le caractère des droits de l’Homme.   


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