Syrie: La Turquie menace de reprendre les opération militaires
La police militaire russe est arrivée dimanche dans la ville de Kobané, dans le nord syrien, théâtre d’une offensive turque début octobre pour « chasser les terroristes » kurdes, alors que le président Recep Tayyip Erdogan menaçait de reprendre les combats dans la région en cas de non-respect de l’accord de Sotchi.
Ces développements coïncident avec la diffusion d’informations faisant état de la « neutralisation » dans la région du chef du groupe autoproclamé « Etat islamique » (EI/Daech), Abou Bakr al-Baghdadi. Déployés pour des patrouilles conjointes avec les militaires turcs dans la ville syrienne, les soldats sont chargés d’ »assurer le contrôle des postes et le respect de la paix sur ce territoire », a indiqué l’officier russe Mikhaïl Elsoukov.
Selon Elsoukov, les militaires turcs, en coordination avec les Russes, suivront un trajet préalablement élaboré, indiquant qu’après l’arrivée de l’armée syrienne, les milices kurdes « se retiraient de leurs positions pour permettre aux troupes syriennes d’occuper les positions de l’avant-garde ». Le ministère russe de la Défense a, pour sa part, annoncé que des dizaines de véhicules blindés avaient été acheminés vers la base de Hmeimim, en Syrie, pour assurer les besoin de la police militaire.
Mardi, les présidents Vladimir Poutine et Erdogan ont signé en marge du premier Forum économique Russie-Afrique de Sotchi (Russie) un mémorandum qui prévoit le déploiement de la police militaire russe et des garde-frontières syriens dans le nord de la Syrie. Les militaires de ces pays devront assurer le retrait des milices kurdes et de leur armement, d’une bande de 30 kilomètres de profondeur le long de la frontière, dans le nord-est de la Syrie, près de la Turquie. Ce territoire avait été visé par l’offensive d’Ankara. Les Russes et les Turcs ont prévu de débuter des patrouilles communes dans cette zone après le délai de 150 heures prévu par l’accord, qui expire mardi à 18H00 locales (1500 GMT). La Turquie garde aussi la haute main sur une autre région du nord-est où son armée est déjà présente, et dont elle a pris le contrôle au cours de son offensive du 9 octobre contre les combattants kurdes des YPG, qu’Ankara considère comme des « terroristes ». Ce déploiement intervient au lendemain de la menace d’Erdogan de reprendre les combats pour « chasser les terroristes » de la frontière si cet accord n’était pas respecté. Malgré la menace qu’il brandit, il a souligné que la Turquie avait « dans une large mesure » atteint son objectif d’établir une « zone de sécurité » pour se protéger d’attaques de la part des éléments de Daech et les YPG, et y installer certains de 3,6 millions de réfugiés syriens qu’Ankara a accueillis.
Toutefois, Washington a amorcé l’envoi de renforts dans l’est pétrolier syrien, a indiqué samedi un responsable du ministère de la Défense américain, alors qu’un convoi militaire arborant des drapeaux américains entrait en Syrie depuis l’Irak voisin. Il a indiqué que Washington avait commencé à renforcer ses positions dans la province de Deir Ezzor, où se trouvent les principaux champs pétroliers syriens, en coordination avec les Forces démocratiques syriennes (FDS), dominées par les combattants kurdes.
La situation sécuritaire dans le nord-est de la Syrie a été au centre de discussions entre plusieurs dirigeants à Sotchi. Dans une conversation téléphonique samedi, Poutine a informé son homologue français Emmanuel Macron, du contenu détaillé des pourparlers russo-turcs sur la Syrie, estimant que le mémorandum d’accord « respecte les intérêts de toutes les parties impliquées et encourage le rétablissement de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie ». Les deux dirigeants ont également exprimé l’espoir que la première réunion du Comité constitutionnel syrien qui se tiendra prochainement soit constructive et productive. En outre, jeudi, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, et son homologue allemand, Heiko Maas, ont eu une conversation téléphonique sur la situation en Syrie. Ils sont convenus que l’une des étapes cruciales du règlement de la crise dans ce pays pourrait être le début des travaux du Comité constitutionnel syrien, sous les auspices de l’ONU.