Enfin libéré, un syrien détenu en Hongrie veut saisir la CEDH
Un Syrien libéré après quatre ans de détention controversée en Hongrie a indiqué samedi à l’AFP « être rentré chez lui » à Chypre et vouloir désormais saisir la Cour suprême hongroise, ainsi que la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH).
« Je peux enfin serrer mes enfants et ma femme dans mes bras », a déclaré très ému Ahmed Hamed, 42 ans, qui avait été condamné à cinq ans de prison pour « terrorisme », une accusation ayant suscité de nombreuses critiques d’organisations internationales. « Je veux saisir la Cour suprême hongroise et si nécessaire, j’irai jusqu’à la CEDH afin d’être blanchi. »
Il avait été reconnu coupable d’avoir utilisé un mégaphone pour organiser des violences et des jets de pierres contre la police hongroise qui venait de fermer la frontière avec la Serbie en septembre 2015, bloquant des centaines de migrants sur la route vers le nord de l’Europe.
Une quinzaine de policiers avaient été blessés, ainsi que plus de 100 migrants qui avaient tenté de forcer la clôture barrant la frontière à Röszke (sud).
Selon le verdict consulté par l’AFP, Ahmed Hamed avait été qualifié de « dangereux fanatique religieux, fidèle sincère des enseignements du Coran » parce qu’il avait « approfondi ses études » du livre sacré des musulmans.
Il avait bénéficié le 19 janvier d’une libération conditionnelle et devait être expulsé, mais il était resté plusieurs mois encore en détention avant de pouvoir regagner Chypre. « Je ne sais pas pourquoi cela a duré autant de temps », dit-il.
Selon les défenseurs des droits humains, le Syrien était devenu le symbole d’une politique et d’une rhétorique abusives de la part du gouvernement du nationaliste Viktor Orban envers les réfugiés, d’où ce surnom de « terroriste d’Orban ».
Ce dernier avait accusé Bruxelles d’être « du côté des terroristes », parce que l’Union européenne critiquait cette condamnation.
Le département d’État américain avait aussi dénoncé « une interprétation large de ce que constitue le terrorisme ».
Ahmed Hamed avait vécu une dizaine d’années à Chypre, membre de l’Union européenne, où il jouissait du statut de réfugié. Il affirmait avoir quitté sa femme et ses deux fillettes en août 2015 pour partir aider ses parents âgés et six autres membres de sa famille à fuir de la Syrie en guerre vers l’Europe. Un mois plus tard, tous s’étaient retrouvés pris au piège de la fermeture des frontières décidée par Budapest.
Ahmed Hamed, unique migrant condamné pour terrorisme en Hongrie, avait affirmé aux juges avoir utilisé sa connaissance de l’anglais pour servir de médiateur entre les migrants et la police, ce dont atteste une vidéo tournée ce jour-là.
Condamné à 10 ans de prison au titre de la législation antiterroriste, il avait vu sa peine réduite à cinq ans en septembre 2018.
Entre-emps, tous les membres de sa famille, qui avaient depuis quitté la Hongrie, avaient obtenu l’asile en Europe occidentale.