Gérard Welter : Dessine-moi des Peugeot qui gagnent

Après 47 années passées au service du design Peugeot, dont il avait pris la direction il y a 20 ans, Gérard Welter tire sa révérence. Sa mort a suscité une grande émotion, au sein de la marque au lion comme auprès de ses fans, en particulier ceux ayant aimé sa création fétiche: la Peugeot 205.
Certains hommes vouent leur vie à une passion, parfois même à une entreprise. C’est le cas de Gérard Welter qui, après 47 ans de bons et loyaux services chez Peugeot, a rendu l’âme le 31 janvier dernier. «Autodidacte génial et passionné de sport automobile, il a réalisé une carrière exemplaire au sein de la marque», lit-on sur un communiqué de presse du constructeur sochalien qui reconnaît le talent et le dévouement de «Monsieur Gérard Welter». Pourtant, rien ne prédestinait cet homme à pareille carrière, et de surcroît au sein d’un grand constructeur automobile. Né en 1942, Welter effectue ses études dans un petit collège de la Seine-et-Marne dont il obtient un diplôme de staffeur qui l’ouvrira aux métiers du plâtre, tels que la restauration d’anciens hôtels particuliers. Un cursus bien modeste par rapport à ses semblables, le plus souvent lauréats de grandes écoles de design. Or, à cette époque, Peugeot cherche des profils comme le sien, afin de conceptualiser des maquettes. Welter intègre alors la «Société des automobiles Peugeot» en 1960 et travaille sous la houlette de son directeur du style, Paul Bouvot. Il n’a alors que 18 ans et doit tout apprendre du métier à une époque où les nouveaux modèles sont d’abord conceptualisés en plâtre. Welter apporte sa contribution au design des 304, 305 et 404, mais c’est bien le traitement caractérisé et incliné de la partie arrière du coupé 204 (photo) qui reste son premier coup de crayon majeur. À l’aube des années 70, Welter participe à la conception de la 504, puis de la 604, modèle qui signe le retour de Peugeot dans le segment des berlines haut de gamme. Les années suivantes sont chaotiques du fait de la conjoncture (chocs pétroliers notamment) et mènent Peugeot au bord du précipice. Welter met alors tout son talent de designer pour enfanter celle qui sauvera la marque d’une faillite annoncée: la 205. «Certains se demandaient si nous n’avions pas dessiné notre dernière voiture», se souviendra-t-il, une vingtaine d’années plus tard. Entre-temps, le constructeur travaillait encore en collaboration avec les bureaux de design de Pininfarina, carrossier attitré de Ferrari. Finalement, le succès colossal de la 205 (plus de 5 millions d’unités vendues) assoira définitivement le talent de Welter qui prend, dès 1998, la direction du design Peugeot, même si le design du coupé 406 est confié à Pininfarina. En revanche, c’est à Welter (et ses équipes) qu’a été confiée la mission de dessiner la remplaçante: le coupé 407. Idem pour une série de concepts futuristes (Proxima, Oxia, Asphalte, Touareg, RC Pique et RC Carreau, Féline, 907…) et modèles réussis, comme le best-seller 307, compacte élue «Voiture de l’année» en 2002, ou encore le séduisant RCZ. Plus proche de nous dans le temps, ce dernier coupé sportif est l’une des plus récentes preuves du génie stylistique de Gérard Welter.